Commune(s) SAUZON (56)
Surface protégée : 168.5 hectares
Unité littorale : ILE DE GROIX ET BELLE-ILE
Au nord-ouest de Belle-île en mer, la côte sauvage s’ouvre dans toute sa splendeur vers l’océan. Formée de vertigineuses falaises, de failles, d’arches, de grottes, de pinacles et d’îlots, elle borde un vaste plateau schisteux où pelouses et landes atlantiques s’étirent à perte de vue. Entaillée au nord par deux profonds vallons et ça et là parsemée de plages de galets et de sable, elle présente un paysage primaire saisissant. Telle une peinture vivante évoluant au rythme de lumières changeantes, elle suscite de multiples perceptions. Les jours de grand bleu, une mer d’huile frangée de fines écumes vient lécher en douceur les rivages. Plus haut sur terre, les landes blondes, mauves et jaunes forment une palette aux couleurs chatoyantes. Que le ciel se couvre et un autre visage apparaît. À mesure que le vent se lève, les premières risées forment à la surface des eaux des clapotis qui, peu à peu, s’argentent et se grisent. Les houles augmentent, claquent en gerbes et s’insinuent avec force dans les replis découpés de la côte. Puis vient le moment du grand respect. Celui où le mètre quatrevingt des Hommes se confronte à plusieurs dizaines de mètres de falaises submergées par les embruns. C’est le temps du vent qui siffle et balaye ; l’heure d’une autre beauté. De celle qui mouille et décoiffe. Au large, isolés de Belle-Île, les îlots de Roc’h Toul, d’île en Oulm et Er Hastellic préfigurent l’inexorable érosion marine qui, au cours des temps géologiques, détachera grottes et arches. Épargnés par la violence des éléments, les vallons de Ster Vras, la grande rivière, et de Ster Ouen, la rivière étroite, s’enfoncent profondément dans les terres.
La flore
Le nord de la côte sauvage présente une grande diversité floristique. Sur le plateau de l’Apothicairerie, règnent les landes à bruyères vagabondes et à ajoncs d’Europe. Arrivées à un stade d’équilibre naturel permanent, elles sont d’une telle rareté que seuls quelques sites dans le monde présentent les mêmes caractéristiques. Très vulnérables au feu, elles nécessitent la plus grande attention. Parsemées de carottes de Gadeceau, de bruyères ciliées et cendrées, elles présentent de multiples variations chromatiques. Du printemps à l’automne, elles arborent tour à tour de somptueuses couleurs jaune d’or, rose purpurin, rouge violacé… Les pelouses rases abritent, en bordure de rochers, nombre d’autres espèces originales. Le plantain à feuilles carénées, implanté en coussinets denses et compacts, côtoie l’isoète des sables et l’ophioglosse du Portugal, discrètes petites fougères souvent associées. Des herbes vivaces, tels le statice à feuille ovale et la fétuque de Huon, poussent en compagnie du genêt des teinturiers, sous-arbrisseau naguère utilisé pour teindre en jaune le lin et la laine. Sur les corniches et affleurements rocheux arrosés par les embruns, l’inule fausse criste et la perce-pierre plongent leurs longues racines dans les fissures tandis que la salicorne et l’obione se développent au creux de micros prés-salés suspendus. Colonisée par les goélands nicheurs, la végétation des îlots et des falaises tend à se banaliser au profit d’espèces communes telles l’arroche du littoral ou la betterave maritime. Les vallons présentent une tout autre végétation. L’asphodèle d’Arrondeau pousse sur les pentes abritées tandis qu’en aval, au coeur du marais, s’étend une roselière à phragmites et massettes gagnée par les saules. Une tourbière fossile, composée en grande partie de feuilles originaires des forêts submergées de l’île, tapisse les fonds de Ster Vras.
La faune
Grâce à la diversité des milieux de la côte sauvage, les sites de Ster Vras et de l’Apothicairerie accueillent une faune remarquable. Sur les îlots, dans les falaises rocheuses et sur les landes littorales, d’importantes colonies de goélands bruns nichent chaque année. Grands migrateurs, ils arrivent au printemps et pondent leurs oeufs d’avril à juin. Cinq à six semaines après l’éclosion, les jeunes s’envolent pour commencer l’apprentissage de leur vie d’adulte. Plus piscivores que les goélands argentés, ils n’hésitent pas à s’éloigner en mer pour rechercher leur nourriture. Les mouettes tridactyles colonisent les parois rocheuses escarpées de Poul Fré. Sur d’étroites corniches, elles construisent leurs nids avec de la terre et des fragments végétaux cimentés par leurs fientes. Pendant leur nidification, elles sont victimes des attaques des corneilles et autres prédateurs qui affectionnent leurs oeufs. Au pied des falaises, dans la zone de balancement des marées, vivent d’étonnants crustacés aux allures de coquillages. Lors de leur première phase de vie, les pouce-pied font partie du plancton et évoluent transportés par les flots. Ils se transforment ensuite en larve cypride et nagent à la recherche d’un site propice à leur fixation. Arrivés à destination, ils se cimentent définitivement aux rochers et développent tour à tour 6 cuirasses pour se protéger. Bien ancrés, ils se nourrissent grâce à leurs tentacules. Grands corbeaux et craves à bec rouge fréquentent les reliefs schisteux et les pelouses de l’île. Ces corvidés, autrefois plus nombreux, se sont un temps raréfiés du fait des dérangements occasionnés par la forte fréquentation du site. Depuis, grâce aux efforts de protection menés, la tendance semble peu à peu s’inverser. Au-dessus de la lande et des vallons protégés, les busards guettent leurs proies. Le busard des roseaux vit dans le marais, à l’abri de la roselière. Plus à l’aise dans les lieux découverts, busards Saint Martin et cendré préfèrent évoluer dans la lande. La nuit venue, hibou moyen-duc et hibou des marais rivalisent d’éloquence. Entre Hoû-ou soupirés et sourds et bou-bou-bou graves et répétés, leurs chants résonnent dans le marais.
Chaque année, des milliers de visiteurs parcourent les espaces fragiles de Ster Vras et de l’Apothicairerie. Cette concentration estivale exerce une pression considérable sur le milieu qui peine à se régénérer de lui-même.
Acquis progressivement par le Conservatoire du Littoral à partir de 1989 et gérés par la Communauté de Communes de Belle-île en mer, ces sites font depuis l’objet d’un suivi attentif.
Les secteurs les plus dégradés ont été mis en ¨défend¨ via des clôtures de fils d’aciers qui permettent à la végétation de reconquérir les espaces mis à nu par le piétinement.
Des espèces pionnières, telle la frankénie, ont été replantées afin de recoloniser les sols maigres menacés par l’érosion. En quelques années, le couvert végétal est ainsi réapparu en maints endroits. Désormais, un réseau de chemins permet aux randonneurs de découvrir l’ensemble du site.
Les tourbes millénaires de Ster Vras font partie du patrimoine géologique de l’île. Encore trop souvent confondues avec une pollution par hydrocarbure, elles ne doivent pas être prélevées.
Dès 1962, une réserve associative, créée par agrément entre le propriétaire des lieux et Bretagne Vivante SEPNB, a assuré le suivi écologique des habitats de Koh-Kastell. Grâce à cette intervention, la colonie de mouettes tridactyles, qui avait totalement disparu au milieu des années 1960, est aujourd’hui la plus méridionale de Bretagne.
Le Conservatoire assure désormais la maîtrise foncière du site.
Le suivi scientifique et l’animation sont toujours conduits par Bretagne vivante.
Pour que les efforts conjugués de tous ces acteurs aboutissent, le concours de chacun est nécessaire. Il y a quelques années, un incendie a anéanti une part importante des landes à bruyères vagabondes de l’Apothicairerie. Faites attention au feu. Ce site, parmi les plus grandioses de Bretagne, peut aussi s’avérer très dangereux. De nombreuses chutes mortelles ont déjà eu lieu. Ne vous approchez pas du bord des falaises.
Cinq cents ans avant J.C, à l’époque de la civilisation de La Tène, une grande puissance maritime celte se développe en Bretagne. Un peu partout sur les côtes, les pointes rocheuses, inaccessibles par mer, sont protégées côté terre par de solides murailles. Défendues opiniâtrement, il arrive que ces lignes soient débordées par l’ennemi. Pour s’échapper, les survivants s’embarquent alors avec familles et biens pour gagner d’autres promontoires inviolés. À Belle-Île, l’éperon barré de Koh-Kastell, situé à la pointe du Vieux Château, est le plus imposant de l’île. Ce camp vénète à rempart unique, construit en terre mêlée de pierrailles et précédé d’un large fossé, fut également fréquenté aux époques gallo-romaine et médiévale. Rehaussé sous forme de motte castrale au Moyen-Âge, il accueillit l’architecture des premiers châteaux forts en bois. Poteries, monnaies et autres matériels archéologiques y furent découverts. L’analyse des pollens retrouvés dans les tourbes du vallon de Ster Vras révèle de très anciennes pratiques agropastorales. Initiée il y a des milliers d’années, la pâture des pelouses et des landes littorales a disparu peu à peu. Vaches et moutons ne font désormais plus partie des paysages côtiers. Sur cette côte exposée, les vallons marins de Ster Vras et Ster Ouen représentent, depuis des temps immémoriaux, de précieux havres pour les bateaux. Plus au sud, en poste avancé, les vestiges du sémaphore d’Er-Hastellic témoignent de l’importance accordée jadis aux îles pour surveiller les côtes françaises.
Communauté de Communes de Belle-Ile-en-Mer
Haute-Boulogne
56360 LE PALAIS
Tél. : 02 97 31 83 04
Email : ccbi@ccbi.fr
Site Internet : www.ccbi.fr
Bretagne Vivante
19 rue de Gouesnou
29200 BREST
Tél : 02 98 49 07 18
Email : contact@bretagne-vivante.org
Site Internet : www.bretagne-vivante.org